Résumé
Lorsqu’on explore les sources occidentales de la sphygmologie, on ne peut éviter un constat surprenant au premier abord : les médecins de l’époque moderne font peu référence aux écrits médicaux du Moyen Âge. Cette observation ne mériterait pas un long développement si cette rupture heuristique pouvait s’expliquer simplement. Par exemple, si les écrits médiévaux sur la sphygmologie étaient rares, issus d’auteurs obscurs, écrits dans une langue inconnue, si leur diffusion avait été restreinte, leur influence négligeable, si les sources avaient disparu à cause de quelque facteur accidentel, bref s’ils étaient devenus inaccessibles aux Modernes, on comprendrait aisément qu’ils soient éludés dans leurs écrits. Si un bouleversement idéologique, une révolution scientifique ou une modification radicale de la méthodologie médicale étaient survenus, de façon comparable aux mutations qui s’opèrent au XIXe siècle et qui amènent les praticiens et la Faculté à se détourner de la sphygmologie classique, la lisibilité historique de cette rupture serait facile. Mais aucun des paramètres qui viennent d’être exposés ne résiste à l’examen. Les sources médiévales so assez abondantes, certaines proviennent d’auteurs illustres, elles sont largement étudiées et commentées en latin, qui demeure la langue scientifique à l’époque moderne, et beaucoup ont été conservées jusqu’à nos jours. Aucun changement dans les conceptions fondamentales du diagnostic ne s’impose comme explication. Dans ces aspects pratiques, la sphygmologie antique résiste plutôt bien aux assauts des découvertes médicales des XVIe et XVIIe siècles, sur la physiologie cardiaque notamment.
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Références
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Cette notion de degrés, fondamentale dans la médecine médiévale et qui persiste jusqu’au XVIIIe siècle, est issue de C. Galien, De simplicium medicamentorum facultatibus, livre V. Chaque qualité pouvant s’exprimer sous quatre degrés: « Nous disons, par exemple, que le chaud est au premier degré, lorsqu’il nous réchauffe, non d’une manière perceptible, mais conforme au raisonnement. Il en est de même pour le froid, l’humide et le sec. Les qualités qui peuvent manifestement chauffer, ou refroidir, ou hydrater, ou dessécher, sont considérées comme étant au second degré. Celles qui se manifestent plus fortement, sans être au maximum, sont au troisième degré. Celles qui peuvent chauffer tellement qu’elles brûlent, sont quatrième degré. » Cette théorie est à la base de nombreuses classifications des substances médicinales, selon l’effet qu’on peut en attendr
Ibid., p. 188.
Ibid., p. 189.
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Marié, É. (2011). La sphygmologie au Moyen Âge. In: Le diagnostic par les pouls en Chine et en Europe. Médecines d’Asie: Savoirs et Pratiques. Springer, Paris. https://doi.org/10.1007/978-2-8178-0010-3_10
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