L’édification d’une morale médicale dans la France “fin de siècle”

Résumé

Dans l’intimité de ses cabinets comme dans la publicité de ses comités d’éthique, la médecine nous habitue à définir la morale de la fin du XX^e siècle: aseptisée, biopolitisée, préservative. Le médecin joue aujourd’hui auprès du dirigeant et auprès de l’opinion publique le rôle du sorcier dans les sociétés dites primitives, du confesseur auprès du monarque. La médecine ordonne (c’est »l’ordonnance médicale«), elle prescrit (c’est la »prescription médicale«), elle certifie (le »certificat médical«); elle intervient auprès des tribunaux afin d’apporter un autre éclairage à la justice (c’est »l’expertise médicale«). Parfois, elle menace (cf. les rapports médicaux sur les accidents de la route, le sida…); et peut même interdire, définissant l’usage et l’abus (tabac, alcool, activité sexuelle …). Cette attitude de la médecine et de ses agents nous vient directement d’une autre »fin de siècle«¹, celle du XIX^e: une époque où la médecine acquiert un savoir certain et obtient un réel pouvoir.² Notre propos tend à montrer ici que la médecine en profite pour régenter les mœurs.